Modification de la loi « Bodjona » : Quatre rapporteurs spéciaux des Nations Unies interpellent l’Etat togolais
Quatre rapporteurs spéciaux des Nations Unies adressent une communication conjointe aux autorités togolaises en réponse à la modification de la loi du 16 mai 2011 sur la liberté de réunion et de manifestation publiques pacifiques au Togo.
Il s’agit du rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression ; du rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association; du rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l’homme et de la Rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste.
Dans un courrier adressé au chef de l’Etat datant du 11 septembre 2019, les quatre rapporteurs soulignent le caractère restrictif des modifications apportées à la loi dite « Bodjona » et qui ôtent à la liberté de manifestation son essence.
Selon les quatre rapporteurs « Dans certaines circonstances, les droits à la liberté d’expression et de la réunion pacifique peuvent être restreints. Néanmoins, les restrictions, étant l’exception, ne peuvent pas compromettre le droit lui-même, c’est-à-dire la norme (CCPR/C/GC/34 par. 21) ».
Ce rappel rejoint le pacte (CCPR/C/21/Rev.1/Add.13 par. 6) du comité des Droits de l’Homme qui souligne le cadre dans lequel ces restrictions peuvent être formulées. « Dans les cas où des restrictions sont formulées, les États doivent en démontrer la nécessité et ne prendre que des mesures proportionnées aux objectifs légitimes poursuivis afin d’assurer une protection véritable et continue des droits énoncés dans le Pacte. De telles restrictions ne peuvent en aucun cas être appliquées ou invoquées d’une manière qui porterait atteinte à l’essence même d’un droit énoncé dans le Pacte ».
En attendant la réaction des autorités togolaises et précisément Faure Gnassingbé à qui cette communication est adressée, les quatre fonctionnaires des Nations Unies montrent leurs préoccupations à l’égard de ces restrictions. « Nous sommes particulièrement préoccupés par la généralité des restrictions du projet de loi. Nous rappelons que toute restriction légale doit être libellée avec suffisamment de précision pour permettre à un individu d’adapter son comportement en fonction de la règle et elle devrait avoir comme objet ultime de faciliter l’exercice des droits autant que possible ».
Ils recommandent au gouvernement togolais de demander une nouvelle délibération de la loi, ou de certains articles, comme il est prévu par l’article 67 de la Constitution. Seront-ils entendus ou non?
Pendant ce temps, les organisations de la société civile de leurs côtés continuent de se mobiliser autour de l’initiative Bring Back Our Freedom, une dynamique citoyenne pour protéger cette loi sur la liberté de manifestation.